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je sortais derrière mon ami, étonné, comme si je souhaitais qu'on me donne une part, ou au moins aux pauvres et déshérités qui sont très nombreux ici.

je regardais dans tous les sens à l'intérieur de la grande clôture qui entourait le mausolée là où des groupes de gens faisaient la prière, d'autres écoutaient les prêches d'orateurs. j'ai vu d'autres groupe de gens qui pleuraient en se frappant la poitrine, j'ai voulu demander à mon ami ce qu'ils avaient? lorsqu'un convoi funèbre passa devant nous, quelques hommes soulevèrent la dalle de marbre pour enterrer le cadavre, j'ai pensé qu'ils pleuraient pour la disparition de leur cher défunt.

 

 


rencontre des "oulemas"

mon ami m'a emmené dans une petite mosquée qui côtoyait le mausolée, le sol était couvert de tapis, le "mehrab" était gravé de versets coraniques de belle calligraphie.

j'étais attiré par un groupe de jeunes enfants enrubannés assis à côté du "mehrab". chacun d'eux tenait un livre, ils étudiaient, j'étais impressionné par cette scène qui présentaient, des "cheikhs" en bas âges, ils avaient entre treize et seize ans. ils étaient très beaux avec leurs costumes uniformes.

mon ami, leur a demandé où était le sayed ? ils répondirent qu'il dirigeait la prière à côté.

j'ai compris de la causerie, que le sayed est l'un des grand savant, j'ai saisi par la suite, qu'il s'agit de sayed ai-khouy le grand savant de l'académie scientifique de la communauté chi'ite.

il faut remarquer que le titre de sayed: maître chez les chi'ites, est attribué à ceux qui sont de la descendance du prophète; le sayed porte un turban noir s'il est étudiant ou savant en théologie les autres "oulémas" portent le turban blanc et se nomment les "cheikhs" les autres descendants du prophète qui ne sont pas savants portent le turban vert.

mon ami m'a demandé de m'asseoir avec eux, le temps qu'il aille à la rencontre de sayed ai-khouy, ils m'ont bien accueillis et m'ont entouré d'un demi cercle je regardais leurs visages plein d'innocence et de pureté, je me rappelais les dires du prophète:

" toute personne naisse à la disposition naturelle du bon sens, ainsi ses parents feront de lui, un juif, un chrétien, un mage."

j'ai ajouté en moi-même ou feront de lui un chi'ite.

ils m'ont demandé de quel pays je venais ?

- de tunisie

- avez-vous des académies scientifiques ?

- nous avons des universités et des écoles; leurs innombrables questions venaient de tous les côtés, elles étaient pertinentes et précises.

que dois-je dire à ces innocents qui croyaient que le monde musulman était plein d'académies scientifiques où on enseignait les lois islamiques. la jurisprudence, et les interprétations du coran. ils ignorent que le monde musulman a évolué, dans nos pays modernes nous avons changé les écoles coraniques en jardins d'enfants sous les auspices des soeurs chrétiennes. ainsi dois-je leur dire qu'ils sont trop arriérés par rapport à nous ?!

l'un d'entre eux m'a demandé quelle est la doctrine suivie en tunisie"? j'ai dit: la doctrine "malikyya' de l'imam malek; quelques uns riaient, je ne prêtait aucune attention.

ils disent enfin : - connaissez-vous la doctrine "jaafaryya' ?

effrayé j'ai dit : - qu'est-ce que ce nouveau nom ? nous ne connaissons que les quatre doctrines, les autre ne font pas partie de l'islam .

ils m'expliquèrent en souriant que la doctrine "jaafari" est l'essence de l'islam! savez-vous que l'imam abou-hanifa était l'élève de l'imam jaafar-assadek? et que l'imam abou-hanifa disait lui-même:

"si ce n'était les deux années d'éducation chez jaafar j'aurais péri:"

je restais silencieux sans réponses. ils me présentaient un nouveau nom que je n'avais jamais connu. je remerciais. dieu que leur imam jaafar-assadek ne soit le professeur de l'imam malek, pour cela j'ai dit avec fierté:

-nous sommes "malikites" nous ne sommes pas "hanafites".

ils répondirent que les imams des quatre doctrines ont profités les uns des autres, ahmad ibn hanbal a tiré profit de chafey ; celui-ci a tiré profit de malek qui lui-même s'appropriait d'abou-hanifa qui était l'élève de jaâfar-assadek, de tout cela on peut conclure que les quatre sont les élèves de l'imam jaâfar ibn mohammed qui a fondé la première université islamique dans la mosquée de son grand-père le messager d'allah, où il enseigna plus de quatre mille juristes porteurs la tradition du prophète.

j'étais ébahi par ces jeunes, si intelligents, qui s'expliquaient avec autant d'aisance qu'ils récitaient le coran.

j'étais plus étonné encore lorsqu'ils me démontraient quelques références historiques et citaient nombre de volumes et de titres de chapitres, ils s'élançaient dans la discussion comme des professeurs méthodiques et convaincants. j'ai senti ma faiblesse devant eux, j'aurais préféré sortir avec mon ami que de demeurer avec ces enfants, je n'arrivais pas à répondre à leurs questions concernant la jurisprudence et l'histoire.

ils me demandaient : à quel imam je me référais ? j'ai dit : à l'imam malek !

ils disent: "comment tu te confie à un homme mort depuis déjà quatorze siècles? si tu voulais lui demander des innovations, te répondrait-il ?"

 

j'ai réfléchi un instant et j'ai dit :

"toi aussi ton imam jaâfar est mort depuis quatorze siècle.'- oui mais sa parole a porté si loin qu'elle est encore vivante aujourd'hui. et sayed ai-khouy nous aide à la comprendre.

je n'ai pas compris lequel des deux était plus savant, l'imam khouy ou l'imam jaâfar-assadek

j'essayais de changer le sujet de conversation en leur posant des questions pour me dégager de leur emprise tel que: quel est le nombre d'habitants de "najaf'. la distance entre najaf et bagdad, connaissaient- ils d'autres pays que l'irak, et chaque fois qu'ils répondaient à une question je leur en préparais une autre afin de les détourer, car je me sentais incapable de faire face à leurs connaissances, je n'admettais pas cet état de fait, même si au profond de mon coeur j'acceptais ma défaite, que toute la gloire et la grandeur, la vanité qui m'ont été attribués en egypte sont dissipés ici, surtout après la rencontre de ces enfants, je me rappelais alors de la sagesse qui dit

"dis à celui qui prétend avoir toutes les connaissances en philosophie: tu as connu une chose, mais tu as ignoré beaucoup de choses ".

j'imaginais que les esprits de ces jeunes enfants étudiants étaient plus ouverts, mieux formés que ceux des savants d'ai-azhar en egypte et ceux de nos savants de tunisie.

sayed ai-khouy est entré avec un groupe "d'oulémas" respectueux et digne. tous les étudiants se levèrent, moi aussi. ils avancèrent pour baiser la main du sayed, je restais immobile, sayed ai-khouy s'est assit après tout le monde et commença à les saluer un par un jusqu'à mon tour.

mon ami, qui chuchotait à l'oreille de sayed ai-khouy m'a fait signe de m'approcher à côté du sayed, à sa droite. après les salutations et les présentations, mon ami me dit: raconte à sayed tout ce que vous entendez sur les chi'ites chez vous en tunisie.

j'ai dit : nous avons des histoires qu'on entend d'ici et delà , l'essentiel pour moi c'est de savoir moi-même ce que disent les chi'ites et j'ai quelques questions à poser et je veux des réponses franches.

mon ami a insisté pour que je raconte au sayed notre croyance vis à vis des chi'ites.

j'ai dit :" pour nous les chi'ites sont plus dangereux que les juifs et les chrétiens à l'égard de l'islam, puisque eux au moins adorent dieu et croient au message de moïse, alors qu'on nous rapporte que les chi'ites adorent ali et le glorifient, quelques uns d'entre eux adorent dieu, mais considèrent ali comme messager de dieu, je leur racontais l'histoire de la trahison de l'archange gabriel qui a donné le message à mohammed au lieu de le remettre à ali".

sayed khouy restait silencieux tête baissée pendant quelques temps, ensuite il me regarda et me dit : nous témoignons qu'il n'y a de divinité qu'allah" nous témoignons aussi que son messager est mohammed que dieu le bénisse ainsi que sa descendance purifiée. pour nous ali n'est qu'un serviteur de dieu, puis il se tourna vers l'audience et dit : "regardez comment les rumeurs mensongères détournent ces gens innocents ! et ceci n'est pas étonnant puisque j'ai déjà entendu pire venant d'autres personnes". il se tourna vers moi et me demanda si j'avais bien lu le coran.

j'ai dit que j'en avais appris la moitié par coeur à l'âge de dix ans.

il me dit :" sais-tu que tous les groupes musulmans indépendamment de leurs doctrines s'accordent sur l'authenticité du coran ? et nous possédons tous les mêmes textes" ?

j'ai répondu :" bien sûr que je le sais"

il me dit : "donc tu as lu les propos d'allah exalté soit-il":

" mohammed n'est qu'un messager de dieu avant lequel les messagers sont déjà passés" ai-maâida, verset 144.

dieu dit aussi :

" mohammed est le messager de dieu et ceux qui sont avec lui, sont durs avec les mécréants…" ai-fath, verset 49.

et dans un autre verset il dit :

"mohammed n'a jamais été le père de l'un de vos hommes, mais le messager de dieu est le sceau des prophètes." ai-ahzeb, verset 40.

j'ai dit:": bien sûr, je connais tous ces versets" !

il me dit:" ou est donc ali ?! si notre coran dit que le messager de dieu n'est autre que mohammed, d'où est venu ce mensonge ?!

je me taisais car je n'avais de réponses, et ajouta:" quand à la trahison de l'archange gabriel (à dieu ne plaise) elle est pire que l'allégation précédente, car lorsque gabriel apporta le message d'allah à mohammed, celui-ci avait l'âge de quarante ans, tandis que ali n'était qu'un gamin de six ou sept ans, comment gabriel pourrait-il se tromper, et ne pas distinguer entre mohammed l'adulte et ali le petit garçon."?

il se taisait longuement pendant que je pensais consciemment à ses paroles.j'analysais ses propos logiques qui m'ont touchés profondément et m'ont éclairés. je me suis demandé pourquoi nous n'avons pas basé notre analyse sur un tel raisonnement logique. sayed ai-khouy poursuivit encore en me disant: "je porte à ta connaissance que les chi'ites sont les seuls parmi tous les groupes musulmans à croire à l'infaillibilité des prophètes et des imams: alors si nos imams (que la paix soit sur eux) sont infaillibles, que dire alors de "gabriel" l'archange que dieu nommait: "l'esprit de fidélité".

- j'ai dit : "alors d'où parviennent ces rumeurs ?"

- il dit :"de tous les ennemis de l'islam qui veulent diviser les musulmans en factions pour qu'ils s'affrontent entre eux. tous les musulmans sont des frères qu'ils soient chi'ites ou sunnites, car ils adorent un seul dieu, sans lui associer aucune autre divinité, ils ont le même coran, le même prophète, la même "kibla'(direction vers laquelle s'orientent tous les musulmans dans leurs prières) les chi'ites se diffèrent des sunnites par des opinions, des convictions, qui ne remettent nullement en cause l'essentiel de ce que je viens de rappeler. les sunnites eux-mêmes connaissent des divergences, l'imam malek contredit l'imam abou-hanifa, celui-ci contredit l'imam chafey, et ainsi de suite".

- alors, tout ce qu'on raconte sur vous n'est que mensonge ?

- par la grâce de dieu, tu est intelligent, et tu comprends les choses, maintenant que tu as visité le pays des chi'ites tu t'es promené dans leur milieu, as-tu vu ou entendu quoi que ce soit de ces rumeurs mensongères ?

- je n'ai entendu et vu que du bien, je remercie dieu qui m'a permis de connaître le professeur moneem dans le bateau, c'est grâce à lui que j'ai pu venir en irak et connu beaucoup de choses que j'ignorais auparavant.

mon ami moneem riait en disant :"parmi ces choses, l'existence d'une tombe pour l'imam ali".

je lui ai fait signe d'arrêter ses plaisanteries. j'ai repris en disant:

- j'ai plutôt appris des choses nouvelles, même de la part de ces jeunes enfants. j'aurais souhaité ( si j'en avais eu l'occasion.) venir étudier comme eux ici; à l'académie scientifique.

sayed al-khouy m'a dit:" sois le bienvenu, si tu veux étudier, toute l'académie est à ta disposition, nous sommes là pour te servir."

tous ceux qui étaient présents se réjouissaient de cette suggestion, surtout mon ami moneem dont le visage s'embellit de joie, j'expliquais que j'étais marié et père de deux enfants.

il dit:" nous prendrons soin de tous les besoins de la famille, logement, subsistance et tout ce dont vous aurez besoin, l'essentiel c'est de continuer les études."

j'ai réfléchi et je me suis dit; il me semble illogique de devenir étudiant après avoir passé quinze ans de ma vie à enseigner et éduquer de nouvelles générations. il m'est aussi difficile de prendre une décision aussi rapidement.

je remerciais sayed ai-khouy pour son offre en promettant d'étudier sérieusement le sujet après mon retour de la mecque si dieu le veut, mais j'aurais besoin de quelques livres.

sur l'ordre de sayed ai-khouy, quelques savants m'ont apportés immédiatement plus de soixante-dix volumes, chacun d'eux me disait: " voici mon cadeau'.

vu que je me rendais en arabie saoudite ; qui interdit l'importation de n'importe quel livre. par crainte de propager quelques croyances qui ne coïncideraient pas avec leur doctrine: je ne pouvais donc pas prendre ces livres avec moi. mais je ne voulais pas négliger ces livres que je n'avais jamais vu.

j'expliquais à mon ami et aux savants les difficultés que je pourrai rencontrer dans tous les pays arabes par lesquels je devais passer, et qui interdisent en majorité l'entrée des livres. alors sayed ai-khouy m'a demandé de lui laisser mon adresse, et qu' il se chargera de les envoyer chez-moi en tunisie.

j'appréciais cette idée et je le remerciais beaucoup en lui remettant ma carte de visite.

quand je l'ai salué pour sortir, il se leva avec moi en me disant:

"je prie dieu qu'il te protège, si tu arrives devant le tombeau de mon grand-père le messager de dieu, tu lui présentera mes salutations:"

les auditeurs ont été très touchés par ses propos, et moi également, j'ai été profondément touché en voyant ses larmes .

je me suis dis; "qu'il ne plaise à dieu" si cet homme soit dans l'erreur ou qu'il soit menteur. son état majestueux, sa grandeur, et sa modestie prouve certainement qu'il est issu d'une noble progéniture, je n'ai pu résister à lui baiser la main. ils se sont tous levés avec moi pour me saluer, quelques jeunes étudiants qui me controversaient m'ont suivi, et m'ont demandés mon adresse, je leur ai donné.

nous retournâmes à koufa sur l'invitation d'une personne qui était à l'audience de sayed ai-khouy un autre ami de moneem qui s'appelait abou-choubbar.

nous avons passé toute une nuit chez lui avec un groupe de jeunes étudiants de sayed mohammed baker-essadr. ils m'ont conseillés de rencontrer ce dernier, ils m'ont promis d'organiser cette rencontre le lendemain.

mon ami moneem a encouragé cette suggestion, mais il regrettait de ne pouvoir nous accompagner, car il avait une obligation à bagdad, il était convenu que je reste chez abou-choubbar trois ou quatre jours jusqu'au retour de moneem qui nous a quitté après les prières de l'aube.

j'ai beaucoup profité des discussions avec les étudiants qui veillaient avec moi, j'ai été surpris des connaissances diverses qu'ils étudiaient à l'académie, car en plus des connaissances religieuses de jurisprudence de "tawhid" ils étudient aussi les sciences politiques, sociales et économiques, l'histoire les langues et l'astronomie, etc.

 

 


rencontre avec sayed mohammed baker-essadr

je me dirigeais avec abou-choubbar a la maison de sayed mohammed baker-essadr, en cours de route il me comblait de courtoisie et de gentillesse et me donnait un aperçu des célèbres savants et du "taklid" (l'action de se confier et de suivre un ouléma).

nous entrâmes dans sa maison, il était entouré par plusieurs étudiants enrubannés, il se leva pour souhaiter la bienvenue. on me présenta à lui et il m'accueillit chaleureusement, me fit asseoir à ses côtés. il me posa des questions sur la tunisie et l'algérie, sur les grands savants célèbres tel que ai khidr hussaîn, tahar ibn achour et d'autres.

j'ai été passionné par sa conversation et malgré sa dignité, son prestige et le grand respect qu'il inspire à ceux qui l'entouraient, je me sentais à l'aise avec lui, comme si je le connaissais depuis longtemps.

j'ai beaucoup apprécié cette rencontre qui m'a apporté de nombreuses connaissances car j'écoutais les questions des étudiants et les réponses qu'il leur donnait, j'ai compris à ce moment précis la valeur d'un dialogue de confiance avec ces oulémas vivants qui peuvent répondre à bien des questions directement et clairement.

je devins alors convaincu, que les chiites étaient bien des musulmans adorant dieu l'unique, et croyant au message de notre prophète mohammed.

seulement au début j'avais beaucoup de doutes, un esprit me soufflait et m'inspirait que tout ce que je voyais n'était que du théâtre ou peut-être ce qu'ils appelaient la "takya", c'est à dire montrer des actes contradictoires aux croyances, mais ces suspicions se dissipaient, les sentiments ont disparus très vite, car il était impossible que des centaines de personnes s'accordent pour me jouer cette comédie, qui suis-je ? en quoi pourrais-je les intéresser pour qu'ils se jouent de moi ? puis voici leurs livres anciens qui étaient écrits depuis des siècles et ces livres nouveaux imprimés récemment depuis quelques mois, tous professaient le monothéisme et invoquaient la bénédiction sur le prophète mohammed, comme j'ai pu le constater moi-même dans leurs introductions et préfaces. même ici dans la maison du sayed, le célèbre savant, connu en irak et en dehors de l'irak, à chaque fois que le nom de mohammed était prononcé toute l'assemblée prononçait à haute voie :  " o dieu que ta bénédiction et ton salut soit sur mohammed ainsi que sur sa descendance purifiée. "

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