l'ecole d'ahl - ul - bayt: premiere des cinq ecoles

 

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(313)

. ce soulèvement fut le premier soulèvement en islam contre un gouvernement injuste, et une protestation contre le serment d'allégeance obtenu par la force et illégalement. il s'opposait ainsi aux appels à la résignation et à la soumission à l'injustice -en un mot à l'intoxication- lancés à l'époque par les "uléma" de la cour, les agents stipendiés du pouvoir, qui préconisaient la nécessité de respecter le serment d'allégeance prêté -même par duperie- au gouvernant injuste, et d'accepter tous les péchés dont celui-ci se rendrait coupable, oubliant les affirmations du prophète qui avait dit :

«le serment d'un pécheur est nul.» et :

«il ne faut pas obéir à une créature qui demande la désobéissance au créateur.»

et ignorant cette parole d'allah :

«ne vous appuyez pas sur les injustes, sinon le feu vous atteindra.»

(314)

quant au petit-fils du prophète, le martyr al-hussayn ibn 'alî, il a lancé l'appel au soulèvement et il est tombé en martyr, le 10 muharram de l'an 61 de l'hégire, à karbalâ', en iraq, réduisant à néant tous les appels au faux et toutes les explications spécieuses. ce faisant, il a laissé le cri du sang et du martyre étouffer les voix de ces esprits portés à l'avidité et à la soumission.

le martyr al-hussayn a défini pour la ummah la voie et les motifs de son soulèvement en s'écriant :

«... je ne me suis pas soulevé de gaieté de coeur, ni pour une quelconque insatisfaction personnelle... je me suis soulevé pour réformer la ummah de mon grand-père, le messager d'allah, et pour commander le bien et interdire le mal, et pour suivre les traces de mon grand-père et de mon père.»

(315)

puis, dans une lettre adressée aux kûfites, il a défini les qualités requises pour un imam et un dirigeant qui prétend diriger les musulmans : «je le jure par ma religion : l'imam ne peut être que celui qui gouverne selon le livre, qui établit l'équité, qui a pour religion la religion vraie, qui s'en tient scrupuleusement aux prescriptions d'allah.»

(316)

et dans une lettre adressée aux notables de basrah, il leur expliquait pourquoi ils avaient le devoir de le suivre dans son soulèvement contre le "calife" usurpateur : «je vous appelle au livre d'allah et à la sunnah de son prophète, car la sunnah est réduite à néant et l'hérésie est ravivée. je vous demande d'écouter ma parole et d'obéir à mon commandement, car je vous conduis vers la voie de la guidance. que la paix et la miséricorde d'allah soient sur vous.»

(317)

de cette façon, l'imam al-hussayn a instauré la légitimité du soulèvement contre le gouvernant injuste, et a posé le principe de la lutte et du jihâd sacré contre lui.

on peut lire également dans la biographie politique des ahl-ul-bayt comment ceux-ci ont soutenu les soulèvements 'alawites qui se sont poursuivis pendant plus d'un siècle, aux quatre coins de la nation islamique, après le soulèvement béni d'al-hussayn.

ainsi, lorsque zayd, fils de l'imam zayn al-'abidîn 'alî ibn al-hussayn, et petit-fils du martyr l'imam al-hussayn, s'est soulevé, en l'an 121 de l'hégire et à l'époque de l'imam al-Çâdiq, celui-ci l'a soutenu et s'est affligé de sa disparition.

(318)

en effet, fudhayl al-rassan témoigne :

«je suis allé chez abî 'abdullâh [al-Çâdiq] après l'assassinat de zayd ibn 'alî. j'ai été conduit dans une maison à l'intérieur d'une autre, et là, il m'a dit : "o fudhayl ! mon oncle a-t-il été tué ?

- oui, que je sois sacrifié pour toi ! lui ai-je répondu. il m'a dit alors : que la miséricorde d'allah soit sur lui. c'était un croyant pieux, un connaisseur, un savant, un homme véridique. s'il avait gagné, il se serait acquitté [de sa promesse] et s'il avait obtenu le pouvoir, il aurait su à qui le confier."»

(319)

parmi les exemples merveilleux de ce type d'action politique est la position de l'imam al-kâdhim vis-à-vis d'al-hussayn ibn 'alî ibn al-hassan, l'auteur du célèbre soulèvement de fakhkh, qui eut lieu à médine, au mois de thî-l-qa'dah de l'an 169 h.

selon différentes déclarations et Livres documents historiques, l'imam al-kâdhim a appuyé le principe de ce soulèvement contre le gouvernant injuste, et il a soutenu de tout coeur les insurgés, bien qu'il ait émis des doutes quant à leurs chances de succès car il estimait que les conditions requises pour celui-ci n'étaient pas réunies. c'est pourquoi, s'adressant au dirigeant de ce soulèvement -qui lui paraissait bien déterminé à mener jusqu'au bout son action, il lui dit : «tu seras tué ! aiguise donc tes épées, car ces gens-là sont des pervers, ils extériorisent la foi, mais ils cachent l'hypocrisie et "l'associationnisme"

(320).

nous appartenons à allah et nous retournerons à lui. c'est auprès d'allah que je vous compterai parmi mes partisans.»

(321)

de même, l'imam al-jawâd, le petit-fils de l'imam al-kâdhim, a professé son soutien au soulèvement d'al-fakhkh et aux insurgés, dans les termes suivants : «nous n'avons pas eu, depuis al-taf [la tragédie de karbalâ'], un acte de martyre qui soit plus grandiose que celui d'al-fakhkh.»

(322)

la résistance politique

la résistance politique a joué un grand rôle dans la vie politique de la ummah chaque fois que celle-ci avait affaire à un gouvernant qui n'appliquait pas les lois d'allah et la justice islamique. chacun des saints imams d'ahl-ul-bayt -qui occupaient la place de la direction politique à leurs époques respectives- symbolisait, incarnait et légitimait l'opposition aux yeux des musulmans qui refusaient la déviation et l'injustice du gouvernant. les califes omayyades d'abord, et ensuite abbassides, dont l'histoire n'ignore pas qu'ils se sont écartés de l'islam et qu'ils ont soumis les musulmans à des oppressions et des injustices que la chari'ah réprouve totalement, connaissaient la position élevée et la popularité dont jouissaient les saints imams d'ahl-ul-bayt auprès de la ummah, et déployaient tous les moyens, terreur, subornation, assassinat, emprisonnement, etc. pour s'en débarrasser et les éloigner de l'opinion publique.

ainsi, dès l'accession de l'imam 'alî au califat, mu'âwiyeh, le futur fondateur du règne omayyade, s'est rebellé, alors qu'il n'était encore que le gouverneur de la syrie, contre le calife légitime. puis il s'est rebellé encore contre le califat légitime de l'imam al-hassan, et après avoir obligé celui-ci à renoncer au pouvoir, il a continué à le persécuter et à terrifier ses partisans et ses proches, pour en finir une fois pour toutes avec lui en l'empoisonnant, en l'an 50 de l'hégire.

quant à yazîd ibn mu'âwiyeh, il a suivi les traces de son père, en assassinant atrocement l'imam al-hussayn, et avec lui une constellation de ses proches et partisans pieux, lorsque l'imam a refusé de se soumettre à un "calife" imposé et qui, de plus, violait tous les interdits de l'islam.

après l'assassinat de l'imam al-hussayn, les regards des musulmans se sont tournés vers son fils, l'imam 'alî ibn al-hussayn zayn al-'abidîn, pour voir en lui le symbole de l'opposition au règne omayyade despotique, et attendre de lui le premier signal d'un nouveau soulèvement. et de son vivant, plusieurs révoltes ont éclaté pour défendre les ahl-ul-bayt et venger le sang de l'imam al-hussayn et de ses compagnons. on peut citer la révolte de médine, la révolte de la mecque, le soulèvement d'al-mukhtâr, le soulèvement d'al-tawwâbîn. durant toute sa vie, ce saint imam incarna, aux yeux de la ummah, le sommet de l'opposition -bien qu'il n'ait entrepris aucune action militaire contre les omayyades, qui l'épiaient et le surveillaient de près. mais c'est son attitude de refus passif et silencieux de yazîd ibn mu'âwiyeh, puis de ses successeurs, marwân ibn al-hâkim, 'abdul-malik ibn marwân et de leurs collaborateurs, qui exprimait avec éloquence son opposition au pouvoir en place. en raison des circonstances, l'imam zayn al-'abidîn montrait son opposition par des moyens détournés. ainsi, on peut trouver dans ses "prières de demande"

(323) (du'â', supplications) tous les éléments d'une opinion politique et doctrinale claire qui ne laisse aucun doute sur son attitude d'opposant. de même, il a exprimé clairement son opposition lorsqu'il a manifesté sa sympathie et son affliction pour al-mukhtâr qui s'était révolté contre les omayyades pour venger l'assassinat de l'imam al-hussayn.

c'est son fils, l'imam muhammad al-bâqir, qui prit la direction de l'opposition après lui et qui subit, de ce fait, de nombreuses persécutions de la part des gouvernants omayyades, et de hichâm ibn 'abdul-malik en particulier.

a son époque, un soulèvement éclata, dont la figure de proue était son frère, zayd ibn 'alî ibn al-hussayn.

le calife omayyade, hichâm ibn 'abdul-malik, qui avait la certitude que la source de la prise de conscience politique et du soulèvement était l'imam muhammad al-bâqir, ainsi que son fils ja'far al-Çâdiq, les convoqua et les fit venir de médine à damas, sa capitale.

lorsque l'imam entra à la cour du calife, il salua de la main tous les assistants, mais pas le calife, et il s'assit sans lui demander la permission.

cette attitude exaspéra la rancune du calife, qui lui dit : «o muhammad ibn 'alî ! chacun de vous continue de diviser les musulmans, en prétendant au califat, et en se disant impudemment et par ignorance "imam" !»

il continua à le réprimander sur le même ton, et lorsqu'il se fut tu, les assistants prirent la relève, comme il le leur avait demandé avant l'arrivée de l'imam.

l'imam réagit à cette manifestation d'hostilité à son égard. il se leva et s'adressa à l'assistance dans les termes suivants : «o gens ! où allez-vous et où veut-on vous conduire ? c'est par nous qu'allah a guidé le premier d'entre vous, et c'est par nous qu'il terminera le dernier d'entre vous. si vous avez un royaume actuel, nous avons un royaume à venir, après lequel il n'y en aura pas d'autre, car nous sommes ceux qui ont l'avenir. allah a dit, en effet : "la fin heureuse est destinée à ceux qui craignent allah

(324)."»

(325)

après cela, l'imam fut jeté en prison. il profita de sa présence parmi les prisonniers pour poursuivre son action missionnaire et éducative, et éveiller la conscience politique de ses co-détenus.

le responsable de la prison, effrayé par l'influence qu'exerçait le saint imam sur les prisonniers, en référa au calife hichâm qui, partageant la même crainte quant à la présence, nuisible à ses intérêts, de l'imamdans le centre de détention, ordonna qu'on l'en sorte pour le renvoyer à médine, lui et ses compagnons, par le courrier officiel.

(326)

toutefois, selon ibn jarîr al-tabarî, la raison du renvoi de l'imam à médine était la montée de son influence intellectuelle parmi les masses populaires des syriens à la suite d'un débat public qui avait eu lieu entre lui et le dirigeant des chrétiens.

(327)

après la disparition de l'imam al-bâqir, c'est l'imam al-Çâdiq qui porta l'étendard de l'opposition. pendant la période de son imamat, l'épreuve douloureuse de la ummah en général, et de la famille du prophète en particulier, s'aggrava. l'imam al-Çâdiq s'affirmait jour après jour comme le chef de l'opposition et le dirigeant de la résistance politique, et ce malgré son silence public et le fait qu'il se soit abstenu de s'attaquer ouvertement au pouvoir. les opposants le consultaient toujours, sollicitaient son soutien à leur mouvement, et lui demandaient de prendre le pouvoir. c'est ce qu'a fait par exemple abû muslîm al-khurâsanî lorsqu'il lui a proposé qu'on lui prête serment d'allégeance en vue d'évincer le calife abbasside contesté, mais l'imam a décliné l'offre, sachant que toutes les conditions objectives de la réussite du mouvement n'étaient pas encore réunies.

abû-l-'abbâs al-saffâh connaissait le rôle de dirigeant que jouait l'imam dans l'opposition, et il éprouvait beaucoup de crainte de sa personne. aussi tenta-t-il de s'en débarrasser une fois pour toutes en l'assassinant, mais son projet infâme ne réussit pas, grâce à la protection d'allah. c'était dans ce dessein qu'il l'avait fait venir de médine à hirah (en iraq).

lorsqu'abû ja'far al-mançûr tint la barre du pouvoir, il craignit, comme son prédécesseur, la position de dirigeant de l'opposition qu'occupait le saint imam. ce qui traduit sa crainte, c'est le fait de l'avoir convoqué et fait venir en iraq plusieurs fois. et s'il n'a pas essayé de le faire assassiner, c'est parce qu'il savait que le saint imam avait une personnalité si prestigieuse et jouissait d'une popularité si profonde que toute atteinte grave à sa personne pouvait avoir des conséquences catastrophiques pour le pouvoir.

en témoignent les propos suivants qu'il a tenus à l'égard de l'imam : «ce souci obstruant la bouche des califes [cet opposant, gênant, aux califes], qu'on n'a le droit ni de proscrire, ni d'assassiner ! mais si je n'avais pas avec lui en commun

(328) un arbre dont la graine est bonne, la branche haute, les fruits doux, la descendance bénie, sanctifié dans "al-zobûr" [les ecritures], il aurait risqué beaucoup, car il nous fait beaucoup de reproches et dit beaucoup de mal de nous.»

(329)

l'imam mûsâ ibn ja'far al-kâdhim a succédé à son père comme imam des musulmans, et aussi comme chef de l'opposition. il a tenu tête aux gouvernants abbassides, connus pour leur déviation de l'islam, leur mépris pour la ummah et leur avidité pour le pouvoir et les biens des musulmans.

sous le règne d'abî ja'far al-mançûr, qui a poussé très loin sa répression contre les 'alawites, en les torturant, en les emprisonnant, en confisquant leurs biens, et même en les enterrant vivants sous les arcades de châteaux et de ponts.

sous le califat de l'abbasside muhammad al-mahdî; celui-ci, craignant de plus en plus l'influence grandissante de l'imam al-kâdhim, ordonna qu'on l'amène de médine à baghdâd pour l'interroger et le juger. une fois à baghdâd, le saint imam fut jeté en prison. il y resta jusqu'au jour où le calife, effrayé par un rêve qu'il avait fait -et dans lequel il avait entendu l'imam 'alî ibn abî tâlib réciter à son adresse ce verset coranique très significatif : «seriez-vous capables, si vous tourniez le dos, de semer la corruption sur la terre et de rompre vos liens de parenté»

(330), l'en fit sortir.

sous le califat d'un autre abbasside, al-hâdî, l'étau de la répression se resserra autour de l'imam al-kâdhim et de l'ensemble des descendants de l'imam 'alî, notamment à la suite du soulèvement d'al-fakhkh. le calife avait même juré de tuer le saint imam : «qu'allah me fasse tuer, si je pardonne à mûsâ ibn ja'far !» selon les historiens, le calife était sur le point de mettre à exécution son serment d'assassiner l'imam, et l'exécution de celui-ci ne fut suspendue qu'in extremis, sur l'intervention d'al-qâdhî abû yûsof, un ami de l'imam abû hanîfah.

mais les épreuves de l'imam n'étaient pas terminées pour autant, car le calife décida de l'emprisonner pour l'empêcher de poursuivre le rôle éducatif et de direction qu'il assumait au sein de la ummah.

le saint imam ne put respirer un peu de paix qu'après la mort de ce calife.

toutefois, cette paix ne dura pas longtemps. lorsque hârûn al-rachîd accéda au califat, il convoqua à son tour l'imam mûsâ ibn ja'far al-kâdhim, et le fit venir à baghdâd. là, il s'ingénia à lui faire souffrir le martyre. il l'emprisonna, le tortura, l'enchaîna, on le traîna d'une prison à une autre des années durant, après quoi, le calife donna l'ordre à al-sindî ibn châhik, le chef de la police, de l'empoisonner, ce qui fut fait le 25 rajab de l'an 183 de l'hégire.

c'est l'imam 'alî al-redhâ qui succéda à l'imam mûsâ al-kâdhim. il devint vite un guide en vue et un dirigeant politique, qui imposa sa présence au pouvoir abbasside, en raison d'une part de sa forte personnalité et de sa popularité, et d'autre part de la montée de l'opposition. pour essayer de conjurer le danger qu'il représentait pour le pouvoir, le calife abbasside al-ma'mûn le contraignit à accepter le titre d'héritier présomptif. même contraint et forcé, l'imam n'accepta ce titre qu'en posant deux conditions :

1- il ne participerait pas aux affaires de l'etat ;

2- il accéderait au califat après la mort d'al-ma'mûn.

mais il mourut empoisonné en l'an 203 de l'hégire, alors qu'al-ma'mûn était encore vivant.

après sa mort en martyr, c'est son fils, l'imam muhammad al-jawâd, qui accéda à l'imamat et à la direction de l'opposition. il vécut la partie finale du califat d'al-ma'mûn, lequel le traita avec beaucoup de considération et le maria même à sa fille, umm al-fadhl, dans le but de s'attirer la sympathie de la ummah et de contenter l'opposition dont il était le chef spirituel. mais cette opération de charme ne changea rien à l'attitude de l'imam à son égard, et celui-ci se résolut à quitter baghdâd pour revenir à médine, la ville de son aïeul, le messager d'allah -afin d'y poursuivre ses activités scientifiques et de direction. mais après la mort d'al-ma'mûn et l'accession de son fils, al-mu'taçim, au califat, celui-ci, craignant l'influence de l'imam et ses activités, le convoqua à baghdâd pour le placer sous haute surveillance et l'éloigner de son fief et de sa base populaire.

selon les historiens, l'imam mourut l'année même de sa convocation dans la capitale califale, soit en l'an 225 de l'hégire.

lorsque son fils 'alî al-hâdî accéda à l'imamat, et donc à la direction politique des affaires de la ummah - en l'an 225 h.-, les autorités abbassides, sous le califat d'al-mutawakkil -connu pour son penchant immodéré pour les divertissements, son impudence et son hostilité envers la famille du prophète- lui réservèrent un traitement encore plus sévère que celui qu'elles avaient fait subir à son père. en effet, ce calife haineux s'appliqua à éliminer les descendants de l'imam 'alî et leurs partisans, à les pourchasser, à les proscrire, à les priver de leurs ressources et à empêcher les gens de les aider. il avait une peur panique de l'imam et de son influence.

aussi ne tarda-t-il pas à suivre l'exemple de ses prédécesseurs en lui faisant quitter sa ville, médine, pour samarrâ', où il fut assigné à résidence. le calife menaça à plusieurs reprises de le faire assassiner et de l'emprisonner. sa résidence connut plusieurs descentes de police.

il était souvent complètement assiégé, et privé de contacts avec ses compagnons.

les historiens et les hagiographes ont souligné les raisons pour lesquelles al-mutawakkil a tenu à faire venir l'imam en iraq. contentons-nous de citer brièvement ce qu'a écrit sebt ibn al-jawziyyah à ce propos :

«selon les hagiographes, si al-mutawakkil a fait déplacer 'alî al-hâdî de la ville du messager d'allah [médine] à baghdâd, c'est parce qu'il détestait 'alî et sa descendance, et qu'il avait appris que l'imam jouissait d'une haute position et d'une grande popularité à médine. il avait donc peur de le laisser là-bas.»

(331)

après la mort de l'imam 'alî al-hâdî, en l'an 254 h., à samarrâ', son fils, l'imam abî muhammad al-hassan, qui avait été amené avec son père dans cette ville, poursuivit le rôle de son père et de ses grand-pères, et souffrit de la même répression. ayant adopté la mêmeattitude d'opposant à l'égard de la déviation abbasside, les autorités ne se montrèrent guère tendres envers lui. le calife al-muhtadî ibn al-wâthiq le fit détenir dans une prison dont les geôliers étaient tristement célèbres pour leur cruauté et la terreur qu'ils inspiraient. toutefois, l'imam avait une personnalité si charismatique que même ces hommes sans coeur finirent par se réformer et par suivre le droit chemin.

l'imam al-hassan al-'askarî se trouvait encore en prison sous le califat d'al-mu'tamid. mais un jour, ce dernier ayant un problème délicat concernant une affaire d'irrigation entre des musulmans et des prêtres chrétiens, convoqua l'imam pour l'aider à le résoudre. l'imam ayant vite présenté la solution légale appropriée, le calife ordonna qu'on le libère ainsi que tous ses compagnons.

ce bref exposé de l'histoire politique des ahl-ul-bayt et de leur lutte contre les gouvernants injustes de leurs époques respectives, est révélateur de l'homogénéité de leur ligne et de leur action. il est significatif aussi de leur mission sacrée et du plan préétabli selon lequel ils ont accompli leur tâche et assumé leur rôle. est-ce par un hasard fortuit que onze imams se succèdent, et que chacun d'eux devient le dirigeant de son époque, le guide de la ummah, et le plus érudit de ses contemporains ? regard sur les ecoles juridiques musulmanes 

À l'époque du saint prophète, les musulmans apprenaient de celui-ci les lois et les statuts qui régissaient les affaires de leur société et leurs actes de piété -statuts de la prière, de la famille, de l'héritage, du commerce, du jihâd, du pèlerinage, du louage de terre, de la justice - car c'est lui qui a porté le message, qui a appelé au droit chemin, et c'est lui qui était le porte-parole de la révélation.

après son décès, ils se référaient au livre d'allah et à la sunnah de son prophète -par l'intermédiaire des compagnons et des ahl-ul-bayt qui avaient appris par coeur et assimilé ces deux sources de la loi islamique- pour connaître l'attitude légale à adopter devant chaque situation et chaque problème juridique qui se posait à eux.

naturellement, à la longue, la société musulmane s'est développée, la vie citadine s'est étendue, et de nouveaux problèmes se sont posés, des événements inédits se sont produits (dans les différents domaines de la vie) qui requéraient l'avis de l'islam à leur égard et la détermination du statut légal qui devait les régir. le développement et l'élargissement de la jurisprudence et de la législation ont donc suivi naturellement le développement et l'élargissement de la vie sociale. ceci se passait vers la fin du premier siècle de l'hégire, à l'époque de l'imam muhammad al-bâqir, fils de l'imam 'alî ibn al-hussayn. en effet, selon les différents faqîh, rapporteurs de hadith et hagiographes, l'imam muhammad al-bâqir était le savant de médine, et la référence des uléma de son époque. d'où son surnom d'"al-bâqir" (celui qui pénètre les sciences), en raison de son érudition et de l'enseignement qu'il dispensait dans ce domaine.

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